Le promoteur du Festival Minkana souligne l’intérêt de d’adapter le conte aux enjeux actuels.
Show Azazou en spectacle pendant le Festival de Conte Minkana, Yaoundé, 2022
1- Comment entendez-vous déployer le projet de « la caravane sociale du conte » récemment présenté à la presse ?
La caravane sociale du conte se veut le moyen de contribuer à la consolidation d'une société meilleure. Il est question pour le conte et les conteurs d'intégrer tous les champs sociaux (santé, éducation, politique, économie ...) dans l'optique de passer des messages concrets à chaque domaine d'exploration. Le thème de cette année se rapportait à l’espoir. A cet effet, un appel à participation numérique sera lancé aux conteurs et auteurs du monde entier (professionnels et amateurs) de participer à la campagne digitale baptisée " contes de l'espoir" des contes écrits ou dits en vidéo pour redonner de l'espoir aux victimes des crises qui frappent le monde en ce moment. Les tournées de conteurs sont également prévues dans les écoles, les quartiers, les villes et les villages du Cameroun.
2- 2022 est une année pleine pour vous Azazou, entre le Masa, le Festival Minkana et les autres sollicitations artistiques, avez-vous le temps de vous poser pour créer d'autres contes ?
Malgré mes multiples occupations, je trouve toujours du temps pour créer de nouvelles histoires. Entre temps, j'ai réservé de contes qui me servent toujours car je crée par anticipation. Cependant je ne crée pas que des contes, j'écris des poèmes et des pièces de théâtre car je suis également comédien et metteur en scène. Actuellement, je prépare ma nouvelle pièce de théâtre intitulée SUGAR MAMY qui sera joué au café-théâtre la cheftaine de Yaoundé. Au-delà du conte qui m'occupe un peu plus, je suis un artiste pluridisciplinaire. Cependant, il est important de déplorer le manque de soutien de nos institutions malgré tout ce travail abattu. Après notre brillante participation au MASA 2022 où nous avons valablement représenté le Cameroun aux yeux du monde entier, nous sommes rentrés dans l'indifférence totale de notre pays.
Le conte était l'une des disciplines les plus réduites au MASA. J’ai eu la chance d'être le seul conteur Camerounais en sélection officielle, cela ne signifie-t-il pas quelque chose pour le Cameroun ? Nous devons nous battre pour vivre de notre art et nous devons aussi quémander le respect, le simple respect qui nous est dû au moins par notre ministère de tutelle ? Jusqu'à quand allons-nous faire semblant dans ce pays ? On dira peut-être que personne n'est au courant pourtant la presse et la télévision nationale relaient constamment mes activités professionnelles. Et j’ai apprécié le gros plan qui a été fait sur ma personne en particulier lors de ma prestation au MASA. Franchement, on en a ras-le-bol mais on n’arrêtera pas de travailler pour l'amour que nous avons pour l'art et surtout pour ce pays qui nous appartient tous.
3- Justement, vos contes sont-ils uniquement la quintessence de ce que nos ancêtres diffusaient déjà ou alors vous êtes de plus en plus porté a les adapter au contexte présent, à l’actualité ?
Mes contes sont adaptés aux enjeux actuels. C'est le cas de ESSANG BI NGONG présenté au MASA à l'Institut Goethe d'Abidjan. Ce spectacle de contes expérimentale où je conte avec la peinture sonore de Rass NGANMO pose la problématique du vivre ensemble dans un monde devenu aussi capitaliste et individualiste comme le nôtre.
Le spectacle raconte l'histoire d'un conteur qui raconte une histoire sous un fromager à ESSANG BI NGONG, sa voix rassemble et unis des ennemis qui ne se parlaient pas et ne partageaient rien en commun. Je le redis, le conte doit évoluer, il doit arrêter d'être un accessoire d'animation folklorique. Le conte ne saurait être réduit à si peu pourtant c'est un univers chargé de sciences, de philosophie, d'esthétique et de spiritualité. Je ne suis pas qu'un conteur, je suis un artiste qui se sert du conte pour éclairer le monde.
Propos recueillis par Claudel Tchinda