Des réactions fusent de partout pour fustiger les conditions de création et de fonctionnement des associations telles que précisées dans le projet de loi sur la table des députes.
Tokna Massana, lamyfortain.overblog
C'est une véritable vague qui agite la toile depuis peu. Il y a tout juste quelques heures, une lettre ouverte du collectif des professionnels du secteur culturel adressée aux honorables députés membres de l'assemblée nationale du Cameroun circule sur les réseaux sociaux. Depuis lors, les réactions se multiplient et s’enflamment. Parfait Tabapsi, président de l’Association des Journalistes culturels, la Camac s’attarde sur le contexte, l'idée et d'autres observations pour questionner l’opportunité du projet de loi contesté. Le cinéaste Jean-Pierre Bekolo rumine sa désolation pour les acteurs du monde culturel ayant boudé, lors des élections présidentielles sa démarche pour une mobilisation en faveur de l’intégration des questions culturelles dans les programmes des candidats. C’est à des réactions en chaine qu’on assiste.
La lettre ouverte qui fait l’objet d’un soutien massif sur la toile est la suite logique de la pétition postée dans les réseaux sociaux, il y a quelques jours seulement. Sous le titre ‘‘Non au projet de loi régissant les associations artistiques et culturelles’’, cette pétition conçue par le réalisateur Franck olivier Ndema et logée dans le site Change.Org visait déjà à démontrer par le nombre des adhésions, l’impopularité de cette loi à venir et son caractère restrictif, de nature à mettre à mal le développement des secteurs culturels. L’auteur évoque le regroupement des acteurs de ce secteur et ses sympathisants dans un mouvement dénommé Collectif des Professionnels du Secteur Culturel au Cameroun (CPSCC). Un mouvement spontané, dit-il, qui concerne tout le monde.
La colère est d’ailleurs perceptible dans le flot des réactions qui défilent et s’accumule sur les pages des réseaux sociaux. Tamo Tabe ne se retient pas. Pour lui, c’est clairement une loi liberticide. Puisque ce projet de loi est considéré comme un outil de restriction des libertés. Ce qui est en contradiction, observent certains, avec l’univers artistique où la matière première est puisée dans la substance grise et au moment où les industries créatives connaissent une nouvelle jeunesse. Toutefois, Masse Ma Lon se veut rassurant en indiquant qu’aucune loi ne peut être au-dessus de la liberté de penser et de créer. Après avoir pris connaissance de quelques articles de ce projet de loi, la réalisatrice Elise Kameni souligne qu’elle est irréaliste. La musicienne Sanzi Viany dit son étourdissement de ce que ledit projet de loi vise à gérer les artistes comme des équipes de football.
Encadrer les associations culturelles
En réalité, il s’agit de deux projets de loi déposé sur la table des députés le 26 juin 2020 dernier et défendu le 29 juin par le ministre des Arts et de la Culture. Le projet de loi modifiant et complétant certaines dispositions de la loi N° 90/053 du 19 décembre 1990 relative à la liberté d’association, définit un mode de gestion spécifique pour les associations artistiques et culturelles. Tel qu’expliqué par le ministre Bidoung Mkpatt, il est question d’aménager un cadre législatif propre aux associations, d’exploiter l’énorme potentiel qu’offre le secteur des arts et de la culture, entre autres.
Le deuxième projet de loi régie les associations artistiques et culturelles et artistiques. Il est explicitement énoncé que ‘‘toute association nationale ou étrangère qui souhaite accéder au statut d’association culturelle et artistique, doit obtenir préalablement, un agrément du ministère en charge des Arts et de la Culture’’. Et c’est ici qu’apparait un des point de discorde qui va se consolider avec les notions d’incompatibilités avec d’autres activités à l’article 22, mais aussi de l’obligation d’obtention d’une autorisation pour l’organisation des événements culturels soulignée à l’article 25. Du coup, les opérateurs des expositions diverses, dédicaces, et autres fêtes culturelles s’inquiètent et s’insurgent. Contre cette thèse, le Minac oppose la prolifération des associations qui génèrent des chevauchements dans les initiatives, assorties de nombreuses batailles judiciaires.
Toutefois, les artistes disent leurs désillusions, surtout que ce projet annonce l’organisation du secteur culturel et classe les associations par catégories. Or, depuis des décennies, la question du statut d’artiste a souvent été évoquée sans aucune avancée concrète.
Arthur Melli
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