Blick Bassy pleure Ruben Um Nyobe

Le retour aux valeurs traditionnelles ancestrales est le vibrant plaidoyer dont transpirent les textes de l’ancien membre du groupe Macase.


Blick Bassy, lancement première édition du festival New Bell fest, pan-african-music.com

Blick Bassy vient de renforcer l’épaisseur de son engagement artistique. Les sillons qu’il trace ne sont certes pas nouveaux. Cependant, la force du propos, la profondeur des textes et la pertinence des sujets abordés sortent de l’ordinaire des musiques ronronnantes qui chantent faussement et fadement l’amour. Blick fait le parcours inverse pour retrouver les vestiges de l’histoire du Cameroun, analyser les faits des acteurs de l’époque pour comprendre la marche et la démarche de son pays vers l’avant.

Sur Um Nyobè, l’artiste produit un texte poignant et presque douloureux sous le titre 1958. C’est à cette date, précisément le 13 septembre 1958 que le leader de la lutte pour l’indépendance totale du Cameroun est assassiné par l’armée française. Son corps est trainé sur des kilométrés pour servir d’exemple et dissuader ses sympathisants. A travers la chanson Ngwa (l’ami), l’artiste rend hommage à Ruben Um Nyobè ainsi qu’aux autres figures de l’histoire du Cameroun tels Félix-Roland Moumié et Ernest Ouandié. Blick Bassy souhaitent que ces « héros » qui ont donné leur vie pour leur pays soient réhabilités. Ce titre est porté à cœur par le natif de Mintaba, dans la région du Centre. Le clip qui l’accompagne a été réalisé au Lesotho par Tebogo Malope aka Tebza.

Les chansons ont comme un fil d’Ariane : l’histoire du Cameroun. Cela se vérifie pour le titre Mpodol qui veut dire celui qui porte la parole des siens, en bassa. Blick Bassy y exprime son inquiétude de l’abandon des valeurs ancestrales par les adultes et sa non transmission à la jeune génération. Puisqu’il dans ses prises de parole qui ont suivi la sortie de cet album, il fait remarquer qu’ils sont nombreux les jeunes camerounais qui n’ont pas entendu parler de Um Nyobe. Il explique à Séverine Kodjo-Grandvaux de lemonde.fr que : « On ne nous a pas transmis notre histoire, ni à l’école ni au sein des familles. (…)Beaucoup de Camerounais respectent les coutumes au village, par obligation. Mais sans y adhérer réellement. On constate aujourd’hui un tribalisme contre les Bamiléké, la tribu la plus connectée à ces traditions. Là aussi, il faut s’interroger sur le pourquoi ».

Réécrire l’histoire du Cameroun, la transmettre aux générations présentes et futures, rendre hommages aux figures de l’indépendance, se reconnecter  aux traditions. Voilà la substance du message véhiculé dans le 4ème album de l’ancien membre du groupe Macase. Pour lui, c’est la voie royale pour résoudre les problèmes socio-politiques et économiques auxquels sont confrontés ses compatriotes.

Arthur Melli